137 (2003)
Pour chœur mixte, 3 voix solistes (soprano, mezzo et baryton), 2 pianos et 2 percussionnistes [I° - vibraphone (3 octaves : fa-fa)/caisse claire/3 cymbales (medium/grave - cloutée - aiguë)/3 toms mélodiques (moyen - grave - très grave) // II° - marimba (4 octaves1/2)/timbales/5 temple-blocks/Tam tam]
Texte de Claude-Henry du Bord
Durée 30’. Éditions François Dhalmann
Cette œuvre répond à un cahier de charges très précis : durée de trente minutes au maximum, un chœur amateur (impliquant une écriture musicale simplifiée et un ambitus restreint), un texte pouvant être donné aussi bien dans une église que dans une salle afin d’être repris plus facilement par d’autres ensembles, une instrumentation réduite (mais pouvant être orchestrée par la suite) et enfin, 2 ou 3 voix solistes, dont une serait éventuellement une partie de récitant.
Fort de ces contraintes maximales, et ne voulant pas écrire sur un texte uniquement sacré, j’ai demandé à Claude-Henry du Bord, poète et traducteur, un écrit dont la dramaturgie me permettrait d’élaborer une grande et unique forme, se développant quasiment sans interruption. Celui-ci me remis, en juillet 2001, une réécriture de Super flumina Babylonis, le célèbre Psaume 137 (ou 136 suivant la classification latine de Saint Jérôme) déjà tant de fois mis en musique et qui, comble de l’humour pour un psaume, fait dire aux Hébreux « nous ne chanterons pas » ! (motif rythmique à la base de toute l’œuvre). Nouvelle contrainte, certes, mais profonde réflexion sur la destiné humaine : le déracinement, l’errance, le désespoir, la révolte et la vengeance, l’amertume de l’exil ; je tenais là un grand texte dont la portée universelle me permettrait de travailler… pendant 2 années et 6 mois !
Le texte de Claude-Henry du Bord - dont le travail littéraire est si proche du mien quant à la forme - est écrit en 12 versets (allusion évidente à une lecture chrétienne du texte) qui se renvoient les uns aux autres comme un gigantesque travail de mémoire et de retours des motifs sur eux-mêmes, renforçant par là même le « mouvement d’une explosion de colère qui monte par vagues » du texte biblique initial, c’est à dire de l’abattement/déploration/lamentation à la colère/révolte/indignation.
Comment alors construire une forme musicale d’un seul tenant mais constituée de sous parties ?
Finalement, après de multiples essais préparatifs, divers tâtonnements et abandons, expérimentations dans d’autres œuvres, écrites en cycle, et à l’écriture apurée (pour piano seul, pour voix et piano, pour piano et quintette à vent, conte musical pour enfant) est née 137, vaste fresque sonore - ou tapisserie en plusieurs tableaux - dominée par une volonté de simplification de mon écriture et langage musical :
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choix de motifs très facilement exécutables et mémorisables à l’écoute
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travail sur la répétition à l’identique des motifs qui traversent toute l’œuvre de part en part, donnant ainsi ma propre interprétation du texte (par exemple, le motif du bruissement des saules = celui de l’exil intérieur = chute des feuilles de figuier, ou bien, le motif de Jérusalem = celui de Dieu = accompagnement du bruissement des saules = (en mouvement inverse) chute des feuilles de figuier = le murmure du chœur = rumeur qui enfle, ou bien encore, le Tigre = eau (propre ou sale) = le baptême et enfin, « Nous ne chanterons pas » = rythme de base en homorythmie et unisson = tous unis d’une même voix ou tous autonomes jusqu’aux cris = accord/désaccord dans les deux sens des termes)
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chaque verset développe plus particulièrement un des motifs qui parcourent l’ensemble de l’œuvre, assurant ainsi la cohésion générale
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l’écriture instrumentale est pensée comme la réduction d’une orchestration
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le nombre de percussions est réduit.
Forme musicale de l’œuvre
1ère partie (celle-ci peut être chantée séparément)
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versets 1 à 4 : tutti
Grande pause
2ème partie : versets 5 à 12 agencés de la façon suivante :
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verset 5 : soprano solo et piano (+ interventions ponctuelles du tutti)
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verset 6 : tutti
Demi-pause
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verset 7 : mezzo solo et piano (+ soprano solo et intervention du tutti)
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verset 8 : baryton solo et piano (+ soprano solo, mezzo solo et interventions du tutti)
Très courte césure et :
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verset 9 : tutti
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verset 10 : solistes
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reprise variée du verset 9 : tutti
Enchaîné sans interruption à la coda :
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verset 11 : tutti
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verset 12 : solistes puis tutti