Les inventions (2021) pour ensemble de cinq violes
n°2 : 2:25 - n°3 : 4:42 - n°4 : 7:20 - n° 5 : 9:20
Pour Atsushi Sakaï et Marion Martineau
Commande Radio France pour l’émission Création Mondiale
Éditions Delatour France
Création radiophonique (France Musique) du 31/10/2022 au 06/11/2022 par l'ensemble Hic et Nunc !
Durée : ca.12'
Le cahier des charges de cette commande consistait en l'écriture de cinq petites œuvres d'une durée d'environ deux minutes chacune, l'ensemble ne devant excéder douze minutes.
En écrivant pour ensemble de viole, mon objectif aura été de faire la distinction entre « l'esprit de la viole » – profondément attaché à l'esthétique française des XVIIe et XVIIIe siècles – et les techniques et modes de jeux de ces instruments qui n'ont guère évolués depuis, ceux-ci étant tombés en désuétude au profit de la famille des violons au moment même où leur technique commençait à évoluer vers d’autres possibilités. Dans les faits, les violes n'avaient aucune raison de rester cantonnées dans cet esprit français fait de douceur et de mélancolie.
De toutes les possibilités techniques d'un instrument, chaque culture ou époque n’en retient que certaines, conformément, d'une part aux types de sonorités qu'elle juge acceptables et, d'autre part, aux manières d'exprimer les sentiments selon les mœurs de l’époque. Notre façon d'envisager les violes n'est donc qu'une manière de faire parmi d'autres qui n’ont pas pu se développer pour cause de déshérence.
Lorsque j'écris pour un instrument (seul ou en groupe), je recherche dans d'autres cultures les instruments apparentés et leurs modes de jeux propres. En « acclimatant » et intégrant ces techniques profondément inhérentes à l'instrument, mais non usuelles dans notre culture européenne, j’élargis « naturellement » les possibilités instrumentales que notre culture n'a pas, ou peu retenue jusqu'à maintenant.
Dans ces Inventions, j'ai donc opéré une sorte de « sortie de l'archéologie musicale » afin de faire entrer ces instruments dans notre monde actuel. Par exemple, le sarangi – vièle de l’Inde, du Népal ou du Pakistan tellement proche d’une viole – m'aura donné l'idée de jouer au-delà des frettes (en gliss. ou non), de façon douce ou très tendue, permettant une expressivité et une extériorisation auxquelles cet instrument de l’intime ne nous a pas habitué.
De plus, et tout à fait possibles sur les violes, j'ai bien sûr intégré les techniques actuelles appelées « étendues » telles, le tremolo, les sons sul ponticello ou sul tasto, écrasés, étouffés, l’alternance pizz. md/mg, etc. Ces modes de jeux et de timbres s'ajoutent aux ornements, plaintes, flattements, trilles, etc. dont ils sont les prolongements actuels, contribuant à créer une sonorité d’ensemble nouvelle.
Tout ce travail n'aurait pas été possible sans les talents conjugués d'Atsushi Sakaï et de Marion Martineau avec lesquelles nous avons, dans un esprit de recherche commun, exploré toutes les pistes qu’ouvrent ces Inventions au nom… très XVIIe siècle !
En forme d’arche, cette œuvre en un seul mouvement mais en cinq parties, se joue de façon continue. Toutefois, dans un cadre d'enseignement, il est bien sûr possible de n'en jouer que certaines.